Il est difficile, aujourd'hui, d'affirmer avec certitude la raison de la présence de ces deux piliers au beau milieu des vignes de la campagne causseranaise. L'hypothèse de tours trophées, commémorant une victoire romaine dans la vallée de l'Orb, a longtemps fleuri dans les esprits locaux. Mais ces piliers, parés en opus vittatum et de très belle facture, soutenaient plutôt un aqueduc construit pour alimenter en eau un ensemble d'habitations situé, à l'époque, à l'emplacement actuel de la commune de Causses et Veyran.
Mais, bien sûr, il ne s'agit là que d'une hypothèse...
Un troisième pilier est couché dans les vignes, de l'autre côté de la route (D19) et il y en aurait un quatrième sous cette dernière.
Photos : Les tours romaines de Causses et Veyran (Hérault).
"À trois heures de marche de Béziers, dans le terroir de la commune de Causses et Veyran, au tènement dit des Piales (pilae), et là où la plaine du même nom est resserrée, vers le couchant, par les pentes de deux hauteurs opposées, on aperçoit deux tourelles ou piles rondes, A B, endommagées par quelques arrachements. Une troisième, C, avait été, lorsque je l'ai vue, réduite à deux mètres hors de terre, pour empierrer le chemin qui est au dessous ; je l'ai fait entièrement détruire pour la fouiller ; il ne reste d'une quatrième que deux segments qui gisent au milieu des broussailles sur le penchant d'un monticule, au Nord-Ouest. Ces tours s'alignaient dans la direction du Nord-Ouest au Sud-Ouest. On avait observé pour leur emplacement des distances à-peu-près égales de l'une à l'autre, de 67, 68 et 69 mètres ; leur circonférence était à-peu-près la même ; celle de la tour A est de 6 mètres 75 centimètres et celle de la tour B de 7 mètres 42 centimètres ; leur hauteur est de près de 5 mètres au dessus du sol actuel, mais elle a été plus grande, les fouilles opérées à la tour C ayant montré qu'elle y était enfouie de près de 2 mètres ; les détritus végétaux, les eaux pluviales chariant la terre des collines, ont exhaussé la plaine de Causses. À un mètre de la base de cette tour, et presque à fleur de terre, était un cordon de pierre ayant 6 décimètres de saillie, surmonté, à 38 centimètres d'intervalle, d'une autre assise pareille.
La construction de ces monuments est en petit appareil allongé, de 81 ou 108 millimètres de hauteur sur une largeur qui varie de 108 à 135 et 162 millimètres, mélangé de pièces d'appareil moyen de 108 millimètres de hauteur sur 216 et 243 millimètres de largeur. Partie de ces pierres de revètement, engagée dans l'intérieur de la maçonnerie est de forme pyramidale, et cet intérieur est en blocage à bain de ciment ; les couches de ce ciment entre les pièces d'appareil ont une certaine épaisseur. La seule pierre employée est du calcaire, matière qui abonde aux environs des Causses.
Les tours de Causses sont des monuments d'une haute antiquité. Les pierres de deux appareils qu'on y voit mélangées par assises annoncent un mode propre aux constructions antérieures au bas empire. À cette dernière époque on employait des fragments de toutes mesures et l'éxécution était généralement négligée ; en outre, les murs bâtis suivant la meilleure méthode des anciens avaient, comme les tours de Causses, leurs parements formés de pierres ou briques triangulaires, dont la pointe entrant dans l'épaisseur de la maçonnerie, se liait avec le blocage qui en remplissait le milieu.
La forme de ces tours a fait penser qu'elles sont des tombeaux. Chez les romains les sépulcres ressemblaient à des tours, tels à Rome les mausolées d'Auguste, de Sévère,..."
Extrait du Bulletin de la Société Archéologique de Béziers de M. Ernest SABATIER (Tome Quatrième - 1841)
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